Les peintures infamantes à Florence

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Pendant le Moyen-Âge et la Renaissance, les peintures infamantes étaient fréquentes dans les cités-états de la peninsule italienne. De quoi s'agissait il? 

C'était l'ancienne version des affiches qui représentaient les "recherchés", les affiches wanted. Quelques siècles avant l'invention de la photographie, ceux qui étaient condamnés par contumace étaient couverts d'infamie à travers des portraits sur les murs des palais publics de la ville: ce que, de nos jours, on appellerait le "pilori médiatique". Les gens qui passaient devant ces peintures murales, reconnaissaient aisément les condamnés, représentés souvent d'une manière très naturaliste.

À Florence, c'était sur la façade du Palazzo del Podestà, ou Palais du Bargello, que des peintres célèbres, tels que Sandro Botticelli, Andrea del Sarto et Andrea del Castagno, ont figuré ceux qui avaient trahi leur ville.

La trahison était un des crimes les plus graves contre la ville et les traîtres étaient représentés
pendus par un pied, la tête en bas.

En 1440, après la bataille d' Anghiari, Andrea del Castagno obtint la commande de peindre des personnages des familles Albizi et Peruzzi. Ses fresques étaient si impressionnantes qu'il gagna le surnom de “Andreino degli Impiccati” - Andreino des pendus- , un surnom qui l'accompagna le long de toute sa vie.

Leonardo réalisa un célèbre dessin de Bernardo Baroncelli, pendu aux fenêtres du Bargello, probablement pris sur le vif. Baroncelli était un des conjurés qui avaient participé à la conjuration des Pazzi en 1478 et, en cette occasion-là, ce fut Botticelli qui figura sur les murs du Bargello les conspirateurs qui s'étaient échappés de Florence.

Les autorités de la ville ont confié ces peintures-là aux grands artistes du Quattrocento, parce que ils voulaient des portraits bien faits et bien identifiables. Les artistes n'étaient pas trop contents de ces commandes qu'ils recevaient, d'ailleurs, ils étaient comme des bourreaux qui peignaient la mort figurée de personnages importants, en s'exposant de plus, aux vengéances possibles. 

Andrea del Sarto, pour s'échapper à l'infamie du surnom de son  prédécesseur, “Andreino degli Impiccati”, au début du XVIe siècle, accepta de peindre des pendus, mais il affirma que le travail serait fait par un des assistants de son atelier, Bernardo del Buga. Une grande toile couvrait les échafaudages installés sur le mur à peindre et Andrea y travaillait pendant la nuit, pour ne pas être vu! Au Gabinetto delle Stampe e dei Disegni des Offices on peut admirer les dessins préparatoires de ces peintures murales.
Le pendu, le douzième atout des tarots, montre des similarités remarquables avec les dessins des pendus par un pied de Andrea del Sarto.

Aucune de ces œuvres exécutées sur les murs des palais n'a été conservée. Il s'agissait de peintures qui avaient une fonction limitée dans le temps et il ne nous reste que quelques dessins.

La mémoires de ces œuvres nous fait comprendre le rôle et l'importance de l'image publique déjà pendant l'âge d'or de Florence.